Les acteurs de la chaîne agroalimentaire sont inégaux face à l'inflation -Plus Europe
January 21 2022 - 5:16AM
Bourse Web Dow Jones (French)
Carol Ryan,
The Wall Street Journal
LONDRES (Agefi-Dow Jones)--Les entreprises alimentaires les plus
susceptibles de tirer leur épingle du jeu dans un contexte
inflationniste sont probablement les moins connues des
investisseurs.
Les coûts augmentant tout au long de la chaîne d'approvisionnement
alimentaire mondiale, les consommateurs de part et d'autre de
l'Atlantique paient leurs courses plus cher. Les prix des produits
alimentaires au Royaume-Uni ont augmenté de 4,5% en décembre 2021
par rapport au même mois de 2020, selon les données publiées
mercredi par l'Office national des statistiques. Les prix des
produits alimentaires consommés à domicile ont bondi de 6,5% sur un
an en décembre aux Etats-Unis et de 4,6% en zone euro.
Selon les données de l'Organisation de coopération et de
développement économiques (OCDE), l'augmentation de la facture
alimentaire n'a pas encore atteint les niveaux observés lors de la
crise financière de 2008, lorsque l'inflation des denrées
alimentaires avait culminé à 7,6% aux Etats-Unis et 13% au
Royaume-Uni. Toutefois, les hausses de prix dépassent désormais la
croissance des salaires sur ces deux marchés, ce qui pourrait
devenir un problème pour les supermarchés et les fabricants de
produits emballés qui les approvisionnent.
Risque d'érosion du pouvoir d'achat
Jusqu'à présent, les consommateurs ont été prêts à accepter les
hausses de prix car l'épargne accumulée pendant la crise sanitaire
leur permet de se sentir financièrement à l'aise. Néanmoins, les
supermarchés devraient se méfier de l'inflation. A la suite de la
crise financière, le Royaume-Uni a subi "une augmentation de 30%
des prix des produits alimentaires alors que la croissance des
salaires était nulle, ce qui a entraîné une forte érosion du
pouvoir d'achat", rappelle Andrew Porteous, analyste chez HSBC. Les
consommateurs européens se sont alors tournés vers les spécialistes
du hard discount comme les allemands Lidl et Aldi.
Les distributeurs ne voudront pas renoncer à des parts de marché
qu'ils ont mis des années à récupérer au prix de lourds
investissements. Cependant, ils disposent d'une marge de manoeuvre
réduite pour absorber les coûts cette fois-ci. Deux des principales
chaînes européennes de supermarchés en termes de capitalisation
boursière, Tesco et Carrefour, ont vu leur marge opérationnelle,
pourtant déjà faible, fondre de 1,1 et 1,3 point de pourcentage,
respectivement, entre 2008 et 2020, selon les données de FactSet.
Si le pouvoir d'achat des consommateurs s'affaiblit, les
supermarchés auront de bonnes raisons de rejeter les appels des
grandes entreprises du secteur agroalimentaire à augmenter les
prix.
Des entreprises comme Nestlé, Unilever et Danone réclameront
presque certainement plus d'argent. Selon les estimations de
Bernstein, les fabricants européens de biens de consommation
courante pourraient être confrontés à une hausse de 12% à 15% des
coûts des marchandises vendues au cours des six premiers mois de
2022. Les marques les plus faibles trouveront les négociations avec
les distributeurs sur les prix particulièrement difficiles.
Les fabricants d'ingrédients en meilleure posture que leurs
clients
Les fabricants d'ingrédients alimentaires, comme le producteur de
cacao Barry Callebaut, sont potentiellement mieux protégés de ces
pressions. Leurs coûts augmentent également : l'entreprise
irlandaise Kerry Group, spécialisée dans les ingrédients, a annoncé
une inflation de 2% à 3% pour les matières premières au troisième
trimestre. Mais leurs clients, qui transforment les ingrédients en
produits alimentaires de marque, sont de gros utilisateurs
d'emballages et de fret, dont les prix explosent.
Les fabricants d'ingrédients ont par ailleurs plus souvent
l'occasion d'imposer des hausses de prix, car leurs fenêtres de
négociations sont moins strictement réglementées que dans la grande
distribution. Dans de nombreux marchés européens, les négociations
sur les prix entre l'agroalimentaire et les supermarchés n'ont lieu
qu'une fois par an. Le fait d'être en mesure de fournir des
ingrédients hautement spécialisés dont les fabricants mondiaux de
produits alimentaires ont besoin en très grandes quantités leur
permet également de répercuter les hausses des coûts.
Si l'inflation des denrées alimentaires diminue de manière
inattendue ou est compensée par une forte croissance des salaires,
il y aura moins de raisons de s'inquiéter. Il pourrait être
intéressant, dans ce cas, de posséder des actions des chaînes de
supermarchés, car la demande de produits alimentaires reste élevée
: en 2021, les ventes de produits d'épicerie sur de nombreux
marchés européens ont dépassé de 10% leurs niveaux d'avant la crise
sanitaire, souligne Bernstein, ce qui a permis au cours de Bourse
des distributeurs locaux de réaliser une performance supérieure de
6%, dividendes compris, à celle de l'indice MSCI Europe.
Ce scénario optimiste semble toutefois peu à même de se reproduire.
Alors que l'inflation s'installe, les investisseurs devront
remonter plus loin dans la chaîne alimentaire pour trouver de
bonnes affaires boursières.
-Carol Ryan, The Wall Street Journal
(Version française Valérie Venck) ed: ECH
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January 21, 2022 04:56 ET (09:56 GMT)
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