Carol Ryan,



The Wall Street Journal





LONDRES (Agefi-Dow Jones)--Les stratégies les plus étoffées développées par les grands supermarchés européens dans le e-commerce ne sont peut-être pas les plus efficaces.



Coté à Amsterdam, Ahold Delhaize a annoncé lundi qu'il souhaitait doubler ses ventes en ligne et dégager un bénéfice sur ces dernières d'ici à 2025. La société, qui possède les marques Food Lion et Giant Food aux Etats-Unis ainsi que des enseignes de distribution alimentaire dominantes dans la région du Benelux, augmentera ses dépenses d'investissement annuelles pour les porter de 3% à 3,5% de ses ventes. L'année prochaine, le groupe procédera également à l'introduction partielle en Bourse de sa place de marché en ligne bol.com - un rival néerlandais d'Amazon - et consacrera les fonds ainsi obtenus à son développement numérique.



Carrefour a pour sa part présenté aux investisseurs, quelques jours plus tôt, un argumentaire bien plus tendance. Le groupe français souhaite tripler la valeur brute de ses marchandises en ligne d'ici à 2026 et a signé des accords avec Meta, le propriétaire de Facebook, et Uber Eats pour l'aider à réaliser son projet. Le distributeur s'intéresse au marché florissant de la livraison rapide de produits alimentaires, qui permet aux clients de recevoir leur commande en moins d'une demi-heure.



Des visées sur la publicité en ligne



Carrefour et Ahold Delhaize souhaitent également générer des revenus supplémentaires en vendant de la publicité en ligne à leurs fournisseurs, une opportunité que les supermarchés américains Walmart et Kroger ont été plus prompts à exploiter. Ils surveillent tous Amazon, dont la part des dépenses publicitaires en ligne aux Etats-Unis a dépassé 10% l'année dernière.



L'action Carrefour se négocie à environ 10 fois les bénéfices attendus, contre 14 fois pour celle d'Ahold. Même à ce faible niveau de cours, les plans de transformation de l'entreprise française doivent être pris avec des pincettes. Le distributeur accuse du retard par rapport à ses concurrents en matière de ventes en ligne, qui représentent aujourd'hui environ 6% de son chiffre d'affaires total sur son marché national. Si la nouvelle stratégie devait être couronnée de succès, l'activité d'e-commerce de Carrefour ne représenterait encore que 12,5% des ventes dans cinq ans, estime Bernstein. D'autres grands supermarchés européens comme Ahold Delhaize et le britannique Tesco sont déjà proches de ce niveau.



Cette nécessité pour Carrefour de rattraper son retard explique en partie son pari sur le créneau du commerce rapide, qui connaît une croissance fulgurante mais n'a pas encore fait ses preuves. L'entreprise veut encourager les petits achats alimentaires en ligne. Les achats complémentaires, pour lesquels le consommateur dépense moins de 50 euros, génèrent la moitié du chiffre d'affaires des magasins d'alimentation physiques, mais seulement 7% des ventes en ligne.



Une délicate équation économique



Dégager des bénéfices sur ce marché émergent pourrait toutefois s'avérer délicat. Des start-ups bien financées telles que Flink et Gorillas sont en train d'ouvrir la voie à la livraison rapide de produits alimentaires en Europe, tout comme les entreprises de livraison de repas de restaurants, notamment Uber Eats, Delivery Hero et Just Eat Takeaway.com. Il semble également probable que ce secteur continuera à représenter une partie relativement restreinte du marché de la livraison alimentaire. D'ici à 2026, le drive - un point faible de Carrefour - devrait représenter encore plus de 80% des ventes d'épicerie en ligne sur le marché français, selon les estimations de Bernstein.



Les projets d'Ahold Delhaize sont moins spectaculaires, mais ce groupe est le plus à même d'atteindre ses objectifs. En 2018, Carrefour s'était fixé comme objectif de générer 5 milliards d'euros de revenus alimentaires en ligne d'ici à 2022 - un objectif depuis révisé à 4,2 milliards d'euros en raison du désengagement du groupe en Chine. Il prévoit de vendre pour environ 3,3 milliards d'euros de valeur brute de marchandises en ligne cette année. Pendant ce temps, Ahold a tenu sa promesse consistant à doubler ses ventes nettes en ligne entre 2018 et 2021.



Dans la mesure où elle est bon marché, l'action du groupe français est tentante, mais celle d'Ahold, plus onéreuse, semble toutefois représenter une meilleure affaire.





-Carol Ryan, The Wall Street Journal



(Version française Eric Chalmet) ed: FXS



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November 17, 2021 03:18 ET (08:18 GMT)




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