Rochelle Toplensky,



The Wall Street Journal





LONDRES (Agefi-Dow Jones)--Après avoir défié la gravité en 2020, les valeurs liées à l'hydrogène sont redescendues sur Terre en 2021. Les anticipations des investisseurs sont à présent mieux adaptées à un secteur offrant d'énormes perspectives de croissance, mais sur une échelle de temps encore incertaine et dépendant des aides publiques.



De nombreuses actions associées à "l'hydrogène vert", qui est fabriqué en divisant l'eau à l'aide d'énergies renouvelables, ont perdu plus de la moitié de leur valeur par rapport à leurs sommets du début de 2021, atteints après une ascension fulgurante au cours de l'année précédente. Sur deux et trois ans, des valeurs telles que le fabricant britannique d'électrolyseurs ITM Power et le spécialiste canadien des piles à combustible Ballard Power Systems affichent toujours de fortes hausses.



Pendant que l'enthousiasme des investisseurs pour l'hydrogène diminuait, l'activité industrielle, elle, accélérait. Le nombre cumulé de projets de grande ampleur annoncés a doublé entre janvier et novembre 2021, pour atteindre 522, selon le Hydrogen Council, une initiative qui réunit des entreprises du secteur. Près des trois quarts de ces projets devraient en partie ou totalement entrer en service au cours des dix ans qui viennent et, parmi eux, 40% sont déjà financés ou en cours de construction.



Après de nombreux faux départs, l'avènement de l'hydrogène semble arriver, principalement comme combustible à faible teneur en carbone pour les secteurs qui ne peuvent pas utiliser l'électricité pour se décarboner, comme l'acier et le ciment.



Les aides publiques restent cruciales, car la plupart des clients ne sont pas encore prêts à payer plus cher pour de l'acier ou du ciment verts. A ce stade précoce, la politique compte, notamment pour coordonner la croissance de l'offre et de la demande afin d'éviter de coûteux décalages.



L'Europe et l'Australie se distinguent



L'Europe est en pointe dans le domaine, l'Union européenne et les différents Etats de la régions proposant des stratégies spécifiques et des aides généreuses pour les projets liés à l'hydrogène. Les responsables politiques veulent s'assurer que les entreprises européennes ne seront pas laissées pour compte, comme ce fut le cas pour les panneaux solaires, les batteries ou le numérique.



Cette dépendance politique présente également des inconvénients : les discussions en cours à Bruxelles sur les règles à imposer au secteur signifient que "des projets sont en suspens", indique Pierre-Etienne Franc, président du fonds d'investissement FiveT Hydrogen. Cependant, ces réglementations, une fois finalisées, permettront de dégager des soutiens financiers importants pour les projets liés à l'hydrogène, ajoute le responsable.



De son côté, Pékin travaille encore à l'élaboration de sa stratégie nationale en matière d'hydrogène, mais le gouvernement chinois a proposé certaines aides au secteur et son engagement à atteindre la neutralité carbone d'ici à 2060 amène certaines entreprises publiques à investir dans ce gaz. Ainsi, la compagnie pétrolière Sinopec a récemment annoncé qu'elle construisait un électrolyseur d'hydrogène vert alimenté par l'énergie solaire, d'une taille supérieure aux projets européens.



L'Australie aussi se pose en leader du secteur, avec des projets bien développés d'exportation d'hydrogène, considéré comme un carburant pour l'électricité et les transports au Japon et en Corée du Sud. Si les Etats-Unis sont à la traîne, le projet de loi "Build Back Better" du président Joe Biden, actuellement dans l'impasse, prévoit un crédit d'impôt pour la production d'hydrogène vert. Il s'agirait d'une incitation puissante si ce dispositif était adopté.



McPhy pourrait capter 2% du marché des électrolyseurs



Les fabricants d'électrolyseurs figurent parmi les bénéficiaires les plus évidents de la croissance du secteur. Adam Collins, analyste chez Liberum Capital, estime que ITM, Nel et la société française McPhy pourraient détenir respectivement 10%, 8% et 2% des parts de marché à long terme. Cette activité, dont l'analyste juge qu'elle deviendra rentable au niveau mondial, devrait être soutenue par des services après-vente à marge élevée, une pénurie de capacités de production lors de la décennie en cours et une possible reprise économique induite par la politique de relance des Etats-Unis.



Pour autant, acheter les actions de ces "pure players" du secteur de l'hydrogène implique une importante prise de risque. Même après la correction subie en 2021, Nel et McPhy s'échangent à environ 20 fois leurs revenus à venir tandis qu'ITM présente un multiple de 40 fois. Le temps que mettront ces entreprises à atteindre de tels niveaux de chiffre d'affaires dépend grandement de l'ampleur des aides publiques, de l'innovation technologique et de leur capacité à croître.



Les investisseurs peuvent toutefois compter sur le fait que le thème de l'hydrogène sera plus susceptible de les récompenser en 2022, après une année 2021 décevante, qu'à l'issue d'une forte hausse.



-Rochelle Toplensky, The Wall Street Journal



(Version française Valérie Venck) ed: ECH



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January 05, 2022 05:10 ET (10:10 GMT)




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