QUÉBEC, le 11 sept. 2024 /CNW/ - Pour le Collectif pour un Québec sans pauvreté, le projet de loi déposé aujourd'hui par la ministre Chantal Rouleau et visant à « moderniser » le régime d'assistance sociale passe complètement à côté du nœud du problème, à savoir la nette insuffisance des revenus que ce régime garantit aux gens. La ministre aura beau y apporter tous les changements cosmétiques qu'elle voudra, les conditions de vie des personnes assistées sociales demeureront inhumaines tant et aussi longtemps qu'elle refusera de rehausser leurs prestations.

Rappel

La ministre responsable de la Solidarité sociale et de l'Action communautaire, Chantal Rouleau, a déposé ce matin le projet de loi 71, Loi visant à améliorer l'accompagnement des personnes et à simplifier le régime d'assistance sociale. Ce projet de loi « [modifie] la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles afin principalement d'améliorer l'accompagnement des personnes, de favoriser leur intégration en emploi, leur insertion sociale ou leur participation sociale ainsi que de simplifier le régime d'assistance sociale ».

« Après des mois à nous promettre une grande réforme de l'assistance sociale, force est de constater que la ministre ne livre pas la marchandise. C'est la montagne qui accouche d'une souris. Beaucoup des changements présentés sont purement cosmétiques. Jusqu'à preuve du contraire, le fait de parler dorénavant de contraintes de santé plutôt que de contraintes à l'emploi ou de fusionner les programmes d'Aide sociale et de Solidarité sociale ne changera strictement rien aux conditions de vie des personnes assistées sociales.

« Évidemment, l'assouplissement de certaines règles est bienvenu. Par exemple, c'est une bonne chose que ce ne soit plus juste des médecins qui puissent reconnaître des contraintes à l'emploi. Comme c'est une bonne chose que le délai de prescription pour l'établissement de certaines catégories de dettes passe de 15 à 5 ans. Mais ce sont des mesures qui toucheront très peu de personnes et qui demeurent bien insuffisantes pour leur permettre de manger à leur faim ou de se loger convenablement. »

Rien pour augmenter les revenus des gens

« Il est là, l'angle mort du projet de loi présenté aujourd'hui : aucune augmentation des prestations n'y est prévue. Actuellement, peu importe le programme, le montant des prestations est insuffisant pour permettre aux gens de couvrir leurs besoins de base tels que définis par la Mesure du panier de consommation (MPC).

« Par exemple, les personnes seules au programme d'Aide sociale disposent d'un revenu annuel de 11 245 $, en comptant les prestations et les principaux crédits d'impôt. Cela leur permet de couvrir à peine 46 % de leurs besoins selon la MPC, qui est estimée à 24 200 $. Même au programme de Revenu de base, le plus généreux des programmes, réservé aux personnes avec des contraintes sévères à l'emploi de longue durée, les personnes ne reçoivent de quoi couvrir que 87 % de leurs besoins essentiels.

« À quoi bon mettre en place des mesures pour "améliorer l'accompagnement des personnes" et "favoriser leur intégration en emploi, leur insertion sociale ou leur participation sociale" si ces personnes ont le ventre vide, si elles ne peuvent se payer un billet d'autobus, si elles doivent chercher un endroit où dormir? Pourquoi le gouvernement ne s'assure-t-il pas, avant toute chose, que les personnes assistées sociales aient au minimum de quoi couvrir leurs besoins essentiels? »

Pour une véritable réforme

« Justement, une véritable réforme de l'assistance sociale aurait visé, au minimum, la couverture des besoins de base pour toutes les personnes assistées sociales. Concrètement, cela aurait pu passer par l'élargissement du programme de Revenu de base à l'ensemble des personnes assistées sociales, et ce, même s'il comporte toujours de nombreuses lacunes. »

L'an dernier, le Collectif a fait publier une lettre ouverte, appuyée par 200 universitaires et plus de 350 organisations, pour pousser cette revendication. Il y était souligné qu'ainsi, « le gouvernement pourrait mettre fin à la discrimination inhérente au système d'assistance sociale québécois [et] réaffirmer sa reconnaissance du droit à un niveau de vie décent pour l'ensemble de la population du Québec, y compris les personnes assistées sociales ».

La ministre se mettra-t-elle enfin à l'écoute?

« Au final, le projet de loi déposé aujourd'hui par la ministre Chantal Rouleau est fort décevant, mais il n'est pas si surprenant, conclut Serge Petitclerc. Elle a utilisé la même stratégie que pour le 4e plan de lutte contre la pauvreté, qui a été déposé en juin dernier : gonfler les attentes pendant des mois, prétendre avoir compris le message des personnes et des organismes consultés, puis déposer ce qui se révèle n'être qu'une coquille vide. Alors que le 4e plan de lutte contre la pauvreté est incontestablement le plus insignifiant d'entre tous, sa "réforme" de l'assistance tombera vite dans l'oubli.

« Mais le Collectif garde espoir de faire entendre raison à la ministre et de la voir bonifier son projet de loi. Entre autres moyens d'action, il entend faire pression sur le gouvernement pour qu'il organise une commission parlementaire avec consultation générale sur le projet de loi. Si la ministre est vraiment à l'écoute des personnes en situation de pauvreté et des organismes, elle devrait voir cette option d'un bon œil! »

SOURCE Collectif pour un Québec sans pauvreté

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